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LA RÉSISTANCE
DANS LE VAR

 

LE MOUVEMENT OUVRIER VAROIS DANS LA RÉSISTANCE

 

 

Introduction

 

Lorsque, évoquant la Résistance des français à l'occupant et à ses valets du gouvernement de VICHY, François MAURIAC, cet écrivain et bourgeois écrivit :

“Seule, dans son ensemble, la classe ouvrière est restée fidèle à la Patrie profanée”,

il avait, sans aucun doute, bien pesé des mots.

Profondément antifascistes, attachés aux principes démocratiques, les travailleurs ne pouvaient voir dans la capitulation devant HITLER et, avec l'arrivée au pouvoir de l'homme d'extrême droite PETAIN, qu'une revanche de la pire réaction sur le Front Populaire. Si les conditions dans lesquelles s'était déclenchée la guerre, avec l'arrestation des dirigeants ouvriers les plus appréciés de la grande majorité des travailleurs, devaient semer le doute et le désarroi, très vite la classe ouvrière s'est ressaisie, d'autant plus qu'elle fut la principale victime des dures conséquences de la capitulation et de la politique de collaboration du gouvernement de VICHY.

Voici un fait raconté par un témoin, qui situe l'état d'esprit des ouvriers de l'Arsenal de TOULON vis à vis de PETAIN :

“Lors d'une allocution prononcée par PETAIN à l'adresse des français, la direction de l'Arsenal avait fait installer des hauts parleurs dans tous les ateliers. A l'atelier des machines, qui comptait à cette époque environ 500 ouvriers et employés - raconte ce témoin - les ouvriers avaient été rassemblés devant les hauts parleurs et la débauche devait avoir lieu sitôt terminée l'allocution radio-diffusée de PETAIN. Pour éviter que les ouvriers “se défilent”, le casier, où chaque ouvrier devait quitter son “marron” de présence, avait été tenu fermé. L'allocution fut écoutée en silence, mais avec un manque évident d'attention. A peine le dernier mot fut-il prononcé que les travailleurs se ruèrent vers le casier à “marrons” en exprimant leur hostilité par des “hou-hou” et divers autres cris d'hostilité. Arrivés devant le casier fermé, ils jetèrent leurs “marrons” qui roulèrent dans toutes les directions et l'Agent technique de service ce soir là dut les ramasser et les ranger lui-même dans les casiers car il ne tenait pas à faire un esclandre sur cette manifestation qui jaugeait de la popularité de PETAIN alors au début de son régime”.

 

Comme partout en France, les militants varois, connus pour leur appartenance au Parti Communiste Français, avaient été arrêtés et emprisonnés ou internés dans un camp.

Parmi ceux-là, les deux députés communistes, élus du Front Populaire, Jean BARTOLINI et Charles GAOU ; Henri SEILLON, Secrétaire Fédéral du Parti Communiste Français, qui mourra dans un camp de concentration en Allemagne ; LENDRIN, Secrétaire de l'Union Départementale C.G.T, mort dans un camp en Allemagne ; ORSINI, FLANDRIN, BERTOLINO, F. REVEST de l'Union Locale C.G.T de TOULON ; ROYBON, NICOLINI, DURAND et les dizaines d'autres encore, militants de base du P.C.F, qui furent internés au camp de CHIBRON, à SIGNES, et connurent des sorts divers : emprisonnés, déportés, évadés et quelques uns libérés après plusieurs mois de détention.

D'autres militants de base considérés comme moins dangereux furent laissés en liberté, soit en résidence surveillée, soit soumis à de fréquents contrôles policiers.

Cest dans ces conditions difficiles, dans ce climat de répression que les travailleurs constituèrent, clandestinement d'abord, leur organisation politique, le P.C.F, puis, plus tard, leur organisation syndicale sous la forme de Comités d'Unité syndicale, qui furent les organismes de base de la C.G.T clandestine.

Outre la répression exercée par l'administration pétainiste contre la réorganisation et l'action des organisations ouvrières dissoutes, les Allemands avaient promulgué une série de décrets et arrêtés applicables dans les territoires occupés dès leur entrée en France.

En voici quelques extraits :

“Ordonnance du 10 Mai 1940

Article 3 : Les attroupements dans les rues , l'édition et la distribution de tracts, l'organisation d'assemblées publiques et manifestations anti-allemands de tous genres seront punis.

Article 4 : Seront passibles de peines ceux qui, dans l'intention de nuire aux intérêts de l'occupation allemande, cesseront le travail, congédieront les employés et ouvriers ou engageront d'autres à cesser le travailou à renvoyer des ouvriers”.

Décret du 25 Novembre 1939 publié dans le même opuscule des ordonnances et arrêtés de 1940 :

“Article 2 : Sera puni de bagne ou, dans les cas particulièrement graves, de la peine de mort, qui entrave ou met en danger le fonctionnement normal d'une entreprise importante pour la défense nationale du REICH..”.

Voilà les risques, connus, auxquels s'exposaient ceux qui, dans les villes et villages, entreprises et administrations, organisèrent la résistance à l'occupant, au fascisme.

L'on ne sut que plus tard ce que fut le caractère des peines et de l'emprisonnement : tortures, mort lente dans les camps, exécutions sans jugement.

 

LES COMMUNISTES VAROIS DANS LA RÉSISTANCE

Dès septembre 1939 des perquisitions eurent lieu au domicile de nombreux militants communistes varois.

Elles furent suivies dans plusieurs cas d'arrestations pour reconstitution de l'organisation du P.CF qui, rappelons-le, avait été dissoute par le gouvernement DALADIER, sous le régime de PETAIN, après le 10 Juillet 1940, la répression devient encore plus dure.

Cela n'empêcha pas l'organisation clandestine du P.C.F de continuer son activité.

De nombreux militants étaient internés au camp de CHIBRON, sur le territoire de la commune de SIGNES à une trentaint de kilomètres de TOULON.

Les militants de base restés libres organisèrent la solidarité et certains d'entre eux étaient chargés de porter à CHIBRON, les colis de vivres.

C'est au cours d'une de ces visites qu'un militant, Baptistin ETIENNE se vit confier la mission, par Henri SEILLON, secrétaire de la fédération du VAR du P.C.F qui était, lui, interné, de “contacter” un instituteur Toulonnais, enseignant à OLLIOULES, Hypolite LAMBERT. “C'est un camarade sûr” lui avait-il dit...

Et c'est ainsi que LAMBERT, avec un Seynois esprit ARMANDO, et Baptistin ETIENNE, entreprirent de regrouper les communistes, des jeunes pour la plupart, qui venaient d'être démobilisés en vertu de l'armistice signé le 22 Juin 1940.

LAMBERT assure la liaison avec le Comité Central du P.C.F, par l'intermédiaire d'un militant qu'il rencontre à MARSEILLE. Il ramène de ses voyages des directives et parfois du matériel de propagande, notamment une brochure “PETAIN au pilori”.

Un jeune communiste, récemment démobilisé (dont le père était interné au camp de CHIBRON), Marcel DURAND, se voit confier la tâche de reconstituer “LA JEUNESSE COMMUNISTE” au cours d'une rencontre avec H. LAMBERT et E. ARMANDO.

Voici un extrait du témoignage qu'il avait confié au journal “LE PETIT VAROIS”, à l'occasion du 20ème anniversaire de la Libération :

“J'avais été chargé de reconstituer les Jeunesses Communistes dont j'avais été, pendant deux ans, secrétaire régional. Bientôt, tous nos jeunes étaient regroupés. Nous avions tous de 19 à 25 ans. Aussi nos premières réunions, des parties de pétanque au Père Louis, furent parfois l'occasion de rire. Nous trouvions comique de nous rencontrer ainsi à la “barbe” des Vichistes. Il nous fallait vraiment jouer le jeu, très souvent nous avions une galerie de spectateurs. Mais ces parties de boules furent bénéfiques, quelques rencontres suffirent pour organiser la lutte des jeunes contre Vichy. Début Janvier 1941, un jeune responsable du P.C.F vint à TOULON (Il s'agissait de Pierre GEORGES, qui devait plus tard devenir un résistant célèbre sous le nom du colonel FABIEN”.

L'organisation du P.C.F se développait, les tracts sortaient et étaient diffusés.

En Novembre 1940, par exemple, un tract dénonce le régime de VICHY qui :

“chasse impitoyablement des usines les jeunes femmes, les vieux travailleurs”.

En décembre, un tract s'élève contre la répression “20 000 travailleurs souffrent dans les prisons et les camps”.

On sait ce qu'il adviendra par la suite de ces détenus : certains seront condamnés à mort à la suite du décret de VICHY créant les tribunaux dits “Sections Spéciales”.

Les communistes ne se trompent pas sur les intentions du gouvernement PETAIN et disent dans un tract : “A la porte les forbans de Vichy, valets de l'étranger!”.

Les rapports de police notent aussi en 1940 des inscriptions murales :

“Du travail, un métier pour les jeunes chômeurs !”, “A bas le fascisme !”.

La direction départementale du P.C.F avait aussi confié à un jeune militant, PELLICIA, la responsabilité de la propagande auprès des marins.

Il est intéressant de noter à ce propos que les Allemands, dans leur rapport sur le sabotage de la flotte, écriront :

“Une troupe inoccupée constitue un excellent terrain pour la propagande politique. Il y a d'abord l'influence de la population... Il y a surtout l'action d'agents communistes et gaullistes...”.

En Janvier 1941, l'arrestation d'un distributeur de tracts qui dénonça ses camarades, entraîna l'arrestation de plusieurs membres de ce groupe parmi lesquels: Marcel DURAND, Jeanne PIETRI, Germaine GUEN, CANEBIER, PELLICIA, BEAUCHE - ce dernier tirait les tracts et le journal “ROUGE MIDI” sur une ronéo cachée à La Seyne-sur-Mer dans les locaux de l'artisan, Pierre LEHUJEUR, route de Balaguier.

DURAND, CANEBIER, PELLICIA, BEAUCHE, et LEHUJEUR seront déportés dans un camp en Allemagne en 1944.

Peu après, H. LAMBERT et E. ARMANDO furent aussi arrêtés ainsi que le responsable régional du P.C.F jean MEROT.

Les peines infligées par le tribunal furent très lourdes. De 15 à 20 ans de travaux forcés et même la peine de mort pour Jean MEROT qui toutefois, en raison de son jeune âge, vit sa peine commuée en détention à vie.

De nombreux autres militants étaient en prison depuis 1940, seulement parce qu'ils avaient organisé la solidarité pour leurs camarades internés à CHIBRON.

Lorsque la Zone Sud fut occupée par les Allemands et avant que ces derniers ne pénètrent à TOULON, un jeune avocat toulonnais, Maître SCARBONCHI, qui avait assuré la défense de ces militants, ayant collecté pour les prisonniers, demanda la libération des emprisonnés politiques. Il se heurta à un refus. Par la suite, la plupart de ces emprisonnés furent transférés dans les camps de la mort en Allemagne.

Quelques uns parvinrent à s'évader avant ce transfert et reprirent le combat dans d'autres régions sous de fausses identités tels Edouard ARMANDO, devenu un des chefs de la Résistance dans la région de TOULOUSE.

Mais ces arrestations n'avaient pas réussi à démanteler l'organisation clandestine du P.C.F qui continuait son action. cela on le doit à des antifascistes italiens et notamment à PAJETTA (évadé d'un camp d'internement) qui parvint au cours de l'année 1941 à renouer le contact entre la direction nationale du Parti et des camarades qui, inconnus de la police, n'avaient pas été arrêtés.

Les femmes, notamment, jouèrent un rôle considérable pour assurer l'impression des tracts et journaux ronéotypés, pour la diffusion de ce matériel de propagande, pour assurer des “planques” aux militants. Nous risquerions d'en oublier en voulant toutes les citer, et nous leur rendons hommage à toutes en citant Pauline PIETRI (Mireille dans la Résistance) modeste et appliquée, tenace et courageuse dans sa tâche qu'elle a accomplie à TOULON, sans défaillance, de 1940 à la Libération, comme d'autres le firent à St TROPEZ, à HYERES, à LA SEYNE, à OLLIOULES, à BARJOLS, à COGOLIN, à CARNOULES, à TOURVES, à BRIGNOLES, et dans des dizaines d'autres localités du VAR.

Et, ainsi, malgré les énormes difficultés pour se procurer le matériel d'impression, depuis la ronéo jusqu'au papier, “ROUGE MIDI” continuait sa parution.

Il dénonçait, en Décembre 1941, l'intention de PETAIN de doter deux cents légionnaires de mitraillettes pour en faire une troupe de choc contre les travailleurs.

Il dénonçait aussi la décision de PETAIN de faire appel aux marins de la Flotte de TOULON pour aller garder les côtes de l'Atlantique et de la Manche en remplacement des soldats boches...

...”Varois ! c'est par notre union et notre action que nous empêcherons le sang de nos marins de couler pour l'Allemagne nazie !”...

Dans ce même numéro, sous le titre “QUERELLES STÉRILES”, on pouvait encore lire un article significatif sur la misère de la population laborieuse :

“Il est pénible de constater que sur le Cours Lafayette les femmes crient et même échangent des coups pour se disputer les marchandises... Ménagères ! en vous querellant vous n'obtiendrez rien... Unies, au contraire, vous exigerez que les produits français restent en France et qu'on en fasse une répartition équitable...”.

"Unissez-vous ! et allez réclamer toutes ensemble à la mairie. Pour chasser les affameurs de notre pays, pour que vos petits enfants n'aient plus faim...”.

Les douloureuses expériences des débuts de l'activité clandestine incitaient, pour être plus efficaces, à respecter rigoureusement les règles de sécurité alors que se durcissait la répression devant le développement de l'action.

Voici le texte laconique d'un responsable local adressé au responsable départemental :

“POLO BEBERT.

Organisation propagande : MATURIN - Syndicat : OCTAVE. Réunion du trio deux fois le mois : Nombre d'adhérents à la cellule : 11 - Cotisations : 200 francs. Tout le matériel a été distribué. Il me manque un adhérent ce mois-ci car il a été arrêté”. (1)

 

(1)POLO signifie : Responsable politique. D'une façon générale, le rapport parlé fut préféré au rapport écrit par la suite.

 

Le témoignage de Madame Irène ARMANDO :

“J'avais adhéré au Parti en 1935. Notre premier travail après les arrestations de 1939 a été d'alerter la population. Je disposais chez moi d'une cachette confectionnée par un camarade menuisier où se trouvait une machine à écrire et le matériel nécessaire pour l'édition de papier autocollant et tracts. On m'apportait rue Pomme de Pin, des documents clandestins publiés par le Parti. Il fallait que je les reproduise en plusieurs exemplaires. Je me souviens, en particulier, de l'émotion que j'ai éprouvée le jour où l'on m'a confié l'appel historique du 10 Juillet 1940 lancé par Maurice THOREZ et Jacques DUCLOS au peuple de France, assez rapidement nous avons disposé d'une ronéo”.

L'activité de Madame irène ARMANDO fut interrompue par une perquisition de la police. Toutefois, avertie à temps, elle put cacher le matériel chez des voisins amis.

Toutefois, son premier époux, Monsieur Jean BOEUF, fut arrêté ainsi que d'autres militants : Madame DOLINGER, Monsieur CANTON et son épouse, Monsieur LELIEVRE.

Le seul motif retenu contre Jean BOEUF fut d'avoir recueilli des fonds pour ses camarades internés à CHIBRON. Son défenseur, je jeune avocat, Maître Dominique SCARBONCHI, déclara devant le Tribunal au cours de sa plaidoirie :

“Que peut-on reprocher à Jean BOEUF, si ce n'est d''être solidaire des emprisonnés et d'être un patriote. Si demain on vient taper à votre porte, si on vous dit que des enfants ont faim parce que leurs parents sont en prison, allez-vous demander si ce sont des enfants communistes ? Je déclare devant vous tous, mes confrères, que s'il en était ainsi, je suis prêt à me rallier à eux”.

Jean BOEUF fut condamné à 3 ans de prison. Cela se passait le 28 Mai 1942. Treize communistes furent jugés ce jour-là, par le Tribunal de TOULON. Onze d'entre eux furent condamnés à des peines allant de 1 à 15 ans de prison ; plus de 10 ans de travaux forcés.

Il s'agit de Louise DOLLINGER, Raphaël CARATINI, Pierre LELIEVRE, Ernest CANTON, Juliette CANTON, GIROLAMI, Jean CASTEL. Plusieurs d'entre eux étaient ouvriers à l'Arsenal Maritime de TOULON.

Le Sud de la france n'était pas encore occupé par les armées nazies mais les policiers collaborateurs n'avaient rien à envier à la gestapo ainsi que peut en témoigner Marie Victor CANAL, qui, en février 1942, tomba dans la souricière tendue par la police en se rendant dans un logement qu'il possédait au Quartier Dardennes à TOULON et où il avait hébergé un militant recherché par la police. Ce logement avait servi, aussi, de dépôt pour les tracts et journaux clandestins. Par précaution, quelques tracts périmés avaient été brûlés. Si les policiers ne trouvèrent pas le matériel recherché, ils trouvèrent, par contre, des cendres de tracts où pouvaient encore se lire des phrases ne laissant aucun doute sur le caractère du matériel brûlé.

Conduit au Commissariat de Police, rue Hyppolite DUPRAT, Marie-Victor CANAL fut, pendant dix jours, soumis à un passage à tabac en règle au cours des interrogatoires : coups de pieds dans le ventre et au visage (il eut plusieurs dents brisées), des heures à genoux sur une règle en fer. Il ne parla pas, malgré l'acharnement de plusieurs policiers. Il fut emprisonné à Saint Roch, puis il fut transféré dans une autre région.

De nouveaux coups sévères seront portés par la répression à l'organisation clandestine du PCF Varois fin 1941 et en 1942 et notamment dans l'Arsenal Maritime.

C'est sur l'initiative des militants communistes que se créa, dès 1941, le Front National, organisation clandestine qui regroupa des résistants de toutes tendances et à laquelle adhéra aussi la CGT clandestine.

Paul RIGON (LAPORTE dans la clandestinité) fut désigné comme responsable départemental de cette organisation qui fut l'organisme dirigeant des Francs Tireurs et Partisans Français.

Le Sud de la France ne connut l'occupation allemande qu'à partir du 11 Novembre 1942, jour où les armées nazies franchirent la ligne de démarcation en riposte au débarquement des alliés en Afrique du Nord.

Pour tenter de s'emparer des navires de guerre français ancrés dans le port de TOULON, les Allemands vont essayer l'effet de surprise en laissant croire qu'ils n'occuperont pas TOULON. Le 27 Novembre, au petit matin, ils occuperont TOULON, mais la flotte se sabordera.

Pour le VAR, c'est un tournant dans l'Histoire de la Résistance.

Bien des yeux vont s'ouvrir, et tomber bien des illusions que certains pouvaient encore avoir sur PETAIN.

Si la répression va devenir plus sévère, le long travail d'organisation et d'explication effectué par les communistes va porter ses fruits. L'activité du P.C.F va s'intensifier et son organisation se renforcer par la venue de nouveaux militants. Le numéro de “ROUGE MIDI”, organe de la région communiste du VAR, distribué en Décembre 1942, dont un exemplaire sera saisi par la police dans la boîte aux lettres d'un immeuble de la rue du CANON (le rapport de police précisant “déposé le 20 courant entre 18 heures et 20 heures”), lance un appel :

“Ouvriers et ouvrières du VAR, tous à l'action”.

“Partout où il y a un ennemi, il y a front. Or, l'ennemi est chez nous. N'attendez pas passivement l'arrivée des Américains, des Anglais, des Russes. Notre peuple doit tout faire pour vivre et se libérer”.

“Les Italo-Boches sont installés à TOULON, HYERES, St RAPHAEL.....sur toute notre côte méditerranéenne, dans toutes les villes et les villages de notre département. Partout harcelons-les...”.

Et cet article disait en conclusion :

“Contre l'ennemi soyons tous unis. Renforçons les syndicats, continuons des comités d'unité syndicale, engageons la lutte contre les déportations, pour la ravitaillement, pour 50% d'augmentation des salaires”.

Un autre article s'intéressant plus particulièrement aux Toulonnais soulignait :

“Le magnifique exemple donné par nos marins aux ostrogoths d'HITLER”

( à propos du sabordage de la flotte et des marins tués au cours d'accrochage avec les Allemands). L'article invitait les Toulonnais à :

“Jeter des fleurs sur les flots, tombes de nos marins, héros de TOULON...”.

Parallèlement à cette action de propagande, une partie des effectifs de l'organisation communiste était affectée aux F.T.P.F, non seulement dans les maquis, dont le premier se constituera dans le massif des Maures sur l'initiative de militants du P.C.F, mais aussi dans les villes et villages où ces groupes de F.T.P.F étaient appelés “sédentaires” pour les distinguer de ceux des maquis. Ces F.T.P.F “sédentaires” poursuivaient pour la plupart leurs activités professionnelles et étaient requis pour des actions de sabotage et autres actions armées mises au point par les responsables. Ils étaient aussi utilisés pour assurer la protection, discrète, des manifestations diverses organisées pour le 14 Juillet, le 11 Novembre, etc...

A leur actif, de nombreux sabotages dans l'Arsenal de TOULON, aux chantiers de LA SEYNE-sur-MER, dans les gares (notamment à CARNOULES).

Malgré, ou plutôt, à cause de la présence des Allemands, le P.C.F se renforçait et son action s'amplifiait.

Les principes de l'organisation clandestine s'avéraient efficaces. Les militants trop connus ou évadés étaient affectés dans des régions éloignées de la leur et vivaient sous un nom d'emprunt avec fausse carte d'identité. C'est ainsi que le VAR eut des responsables départementaux venus d'autres départements et le dernier en date, en place jusqu'à la Libération fut un instituteur de la région Toulousaine.

L'essentiel de l'effectif, en dessous du responsable départemental, était composé de militants inconnus de la police, ayant, pour la plupart leur activité professionnelle normale.

Si l'un d'eux était “brûlé”, il passait dans la clandestinité et changeait de région ou était affecté à un maquis.

Dans cette organisation clandestine, les femmes jouèrent un grand rôle comme nous l'avons déjà souligné. Les femmes mais aussi les jeunes filles, comme cette jeune communiste de 17 ans, Rosette CIOFFI, agent de liaison dans la région de SALERNES-AUPS, tombée sous les balles allemandes en accomplissant une mission quelques semaines avant la libération.

Avec l'année 1943, les publications de la région varoise du P.C.F vont se multiplier. “L'Avenir Seynois”, “Aurore Nouvelle” à Hyères, des éditions régionales de “l'Humanité”, de “La Terre”. De nombreux tracts.

En Novembre “ROUGE MIDI” publie un numéro spécial “11 Novembre”, appelant les Toulonnais à manifester Place de la Liberté “contre les occupants et les traîtres, et pour l'ouverture du deuxième front”.

Cette manifestation organisée en commun avec d'autres organisations de la Résistance rassemblera des milliers de personnes et sera marquée par un arrêt de travail à l'Arsenal de TOULON.

Dans ce même numéro, on souligne l'action des ménagères de l'Escaillon (TOULON) qui se sont emparées du contenu de deux wagons de pommes de terre destinés aux Allemands. Celles d'OLLIOULES se sont rendues à la sous préfecture pour demander un meilleur ravitaillement. A HYERES, ce sont 300 femmes qui manifestent devant la mairie.

Ces manifestations sont organisées par des militants communistes.

1943 fut aussi l'année de la constitution du COMITE DÉPARTEMENTAL DE LIBÉRATION.

La première réunion eut lieu au domicile du Docteur LAGIER, boulevard de l'Escaillon; à TOULON, en Avril, le P.C.F y était représenté ainsi que les principaux mouvements de la résistance : M.U.R - Front National -C.G.T - M.N.L - LIBÉRATION - FRANC MACON- COMBAT - A.S- sous la présidence de Monsieur SARRIE (alias BERGER) qui sera nommé Préfet du Var à la Libération.

L'action a été intense dans tous les domaines au cours de l'année 1943 et les communistes ont été les éléments dynamiques dans les sabotages, les manifestations de rues, les grèves.

Les historiens auront certainement un jour tous les rapports des Renseignements Généraux qui relateront “à leur façon” ces évènements.

Un militant a pu conserver une copie d'un de ces rapports. Il s'agit du bulletin des Renseignements Généraux pour la région de TOULON, semaine du 29 Novembre 1943 au 5 Décembre 1943.

Voci ce que l'on peut y lire, page 7, au chapitre anciens partis :

“Les membres des anciens partis politiques s'efforcent de contribuer à la campagne anti-gouvernementale et anti-nationale en propageant activement tous les mots d'ordre émanant de leurs chefs, dans les milieux ouvriers où le terrain est particulièrement favorable, et les travailleurs adressent fréquemment à leurs délégués des revendications, souvent justifiées, qui sont nettement d'inspiration communiste. A bord du paquebot “André LEBON” qui est actuellement à TOULON où il sert de caserne pour les travailleurs de la KRIEGSMARINE, on a remarqué que les revendications formulées par l'équipage sur le plan gouvernemental professionnel sont calquées sur les directives que donnent les tracts communistes et une cabale a été montée contre les partisans du syndicat “D” des messageries maritimes. De nombreux suspects sont arrivés dernièrement à bord de ce navire et sont, selon toute vraisemblance, les promoteurs de ce mouvement. Chez les S.F.I.O, en particulier, la disparition du docteur RISTERUCCI sème le désarroi et désorganise les services clandestins de propagande. De plus, les recherches accrues auxquelles se livre la police allemande gêne considérablement ces organismes subversifs”.

Il est évidemment exact que la police allemande “LA GESTAPO” est très active. Elle parviendra même à introduire un de ses agents dans un maquis F.T.P.F et le début de l'année 1944 sera marqué par un coup dur pour le maquis du plateau des Limattes près de SIGNES, comme on le lira par ailleurs, et cela aura des répercussions sur l'organisation du P.C.F à TOULON. Cet agent de liaison (un Français) s'était acquis la sympathie d'un chef de groupe du maquis et (ce qui était une imprudence) il était venu un jour chez le frère de ce chef à TOULON, René BATTAGLIA, et avait acquis la certitude que ce dernier était un membre actif de la résistance. C'est ainsi qu'après l'affaire du plateau des Limattes, où les maquisards trouvèrent la mort dans un combat inégal, la gestapo fit irruption chez René BATTAGLIA, trouva le matériel d'impression des tracts du P.C.F, du Front National, de la C.G.T, et même d'autres organisations de la Résistance qui utilisaient ce centre d'impression, par l'intermédiaire du Front National.

René BATTAGLIA connaissait les responsables du Parti, des membres du Comité départemental de Libération , les dépôts où étaient déposés les tracts et journaux. Torturé, il ne parla pas. Il fut déporté en Allemange où il mourut dans un camp.

Le P.C.F prit immédiatement des dispositions pour combler cette perte. Le centre d'impression d'HYERES (ronéo, machine à écrire et le couple chargé de cette tâche) fut transféré à TOULON dans une nouvelle planque et le matériel de propagande, après une courte interruption, fut à nouveau diffusé. Mieux même, en Mars 1944 paraît le premier numéro imprimé de “ROUGE MIDI” sur les presses d'un artisan imprimeur de St jean du Var, membre du Front National.

Dans ce premier numéro, l'organe de la région varoise du P.C.F, souligne l'exemple de l'action revendicative et patriotique des travailleurs. Un autre article, sous le titre “BRAVO LES GARS DES CHANTIERS”, salue la grève des travailleurs des F.C.M de LA SEYNE-sur-MER.

Au verso, un article de “MISE EN GARDE” alerte les membres du Parti sur les dangers de prendre des contacts qui ne soient pas autorisés par leur responsable à l'échelon supérieur.

C'est un rappel au respect des règles de sécurité à la suite de l'arrestation de René BATTAGLIA. Cet article précise en effet :

"Nos camarades éviteront ainsi de tomber entre les mains d'éléments provocateurs exclus et écartés du Parti pour activité suspecte et qui se servent d'eux à des fins policières".

Ces journaux sont distribués dans tout le département. Des agents de liaison assurent le transport, par valises ou sacs, dans les principales localités.

Voici , à ce sujet, une anecdote qui mérite d'être citée :

“Une femme qui assurait le transport de tracts et journaux clandestins dans le département, demeurait à TOULON, quartier Ste MUSSE dans une villa dont le rez-de-chaussée était occupé par des soldats allemands. Il s'agissait de soldats assez âgés, car HITLER avait du racler les fonds de tiroir pour compenser ses énormes pertes du front de RUSSIE . Elle avait laissé croire à ces soldats qu'elle faisait du marché noir après avoir acquis leur sympathie. C'est ainsi qu'un jour, ayant à transporter une lourde valise bourrée de journaux et de tracts dans le Haut-var, elle profita d'un camion allemand qui se rendait dans ce secteur, les Allemands l'ayant invitée à prendre place avec eux pour lui faciliter ce déplacement motivé, croyaient-ils, pour des questions de ravitaillement. Il fallait évidemment avoir un sacré culot pour accepter; mais en définitive, c'était aussi éviter le risque des nombreux contrôles effectués sur les routes par la police allemande”.

 

Et ainsi le P.C.F poursuivit son action jusqu'à la Libération.

En juillet 1944, un tract de la région varoise du P.C.F intitulée “POUR LA LIBÉRATION DE LA FRANCE”, disait aux Varois :

“C'est avec une admiration mêlée d'orgueil que nos petits enfants raconteront plus tard, au coin du feu, comment en pleine guerre malgré l'ennemi et les miliciens assassins vous avez arraché aux pillards le pain qu'ils nous ont volé. C'est avec fierté que l'on parlera de la grève des gars de l'Arsenal, des traminots, des municipaux, qui ont contraint les boches à distribuer du pain et à augmenter la ration quotidienne. C'est avec fierté que l'on racontera la lutte admirable des gars des chantiers de La Seyne... On rappelera leur grève et leurs manifestations des 11, 14, 15 et 17 Juillet”.

Et le tract citait encore la lutte des cheminots de CARNOULES (3 grèves en une semaine), l'action des femmes d'OLLIOULES “qui le 10 Juillet occupent une fabrique de pâtes et organisent la distribution à raison de 500 grammes par personne, et qui, le 15 Juillet, réquisitionnent un camion, vont à MARSEILLE chercher de la farine et la distribuent aux boulangers”. L'action des femmes de BANDOL “qui envahissent un dépôt boche , s'emparent des sacs de farine et les portent aux boulangeries”. La manifestation de “ces milliers de patriotes Hyérois aux cocardes tricolores qui ont déferlé comme une mer derrière 10 drapeaux déployés au chant de “La Marseillaise”, de la Place de la Rade au Monument aux Morts disparaissant sous une montagne de fleurs”.

Ainsi se préparait dans l'action, les heures décisives du combat pour la libération du VAR, auquel les communistes varois ont participé activement là où les appelaient leurs responsabilités, soit au sein des F.T.P.F, de la milice patriotique et même, pour certains dans des organismes gaullistes, comme Jacques BRUSCHINI, chef d'un groupe de C.F.L qui trouva une mort glorieuse face aux Allemands peu de jours avant le débarquement en Provence.

 

 

LES SYNDICATS

Comme dans l'ensemble de la France, la C.G.T, principale organisation syndicale ouvrière, s'est scindée dès le début de la guerre.

Mais, si les dirigeants de la tendance JOUHAUX purent conserver la direction de l'Union Départementale et de la plupart des Unions Locales et Syndicats, ceux de la tendance FRACHON furent victimes de la répression et pour la plupart internés dans des camps ou emprisonnés. L'un d'eux Jean BERTOLINO, secrétaire de l'Union Locale de TOULON s'évade du camp de St Sulpice et reviendra dans le VAR où il deviendra chef du premier maquis varois : le camp FAITA (F.T.P.F), dans les Maures. De nouveau arrêté en 1944, il mourra à MAUTHAUSEN.

Après la capitulation de Montoire et l’instauration du régime de PETAIN, ce fut au tour des dirigeants de la tendance JOUHAUX d'être écartés de la direction C.G.T.

Quelques uns, dont la tendance est moins marquée, parviendront à se maintenir dans quelques conseils d'administration de syndicats, appliquant ainsi les consignes de leurs dirigeants déchus.

Mais les effectifs de ces syndicats fondent comme neige au soleil, car les travailleurs n'ont pas confiance à ces syndicats dirigés par les pétainistes.

Pourtant, “LA VIE OUVRIÈRE” éditée clandestinement appelle dans son numéro du 10 Août 1940, à aller au syndicat. Après avoir souligné le dégoût et le mépris des travailleurs pour les dirigeants syndicaux sans mandats, “LA VIE OUVRIÈRE” écrit

“Mais tant que le syndicat est resté une base légale de rassemblement et d'action des ouvriers, notre devoir est d'y aller...”.

Les travailleurs sont méfiants et il faudra beaucoup de temps et de patience à l'organisation syndicale clandestine pour obtenir le retour de nombreux ouvriers aux syndicats légaux dirigés, pour la plupart, par des pétainistes.

Début 1942, sous la responsabilité de PORTALIS, ancien secrétaire de l'Union Départementale C.G.T, (poste qu'il partageait avec LENDRIN arrêté en 1939, puis déporté) se tint à TOULON, rue Victor Clappier au siège de la Caisse Assurances Sociales “LE TRAVAIL”, une réunion clandestine à laquelle assisteront des militants des deux tendances syndicales (FRACHON et JOUHAUX) existant dans la C.G.T de cette époque.

A cette réunion fut renouvelée la consigne de rejoindre les syndicats légaux. Sans qu'une décision fut prise pour refaire l'unité syndicale, car les méthodes d'action différaient entre les deux tendances , l'on a pu constater par la suite que des militants de la tendance JOUHAUX se sont retrouvés pleinement aux côtés de ceux de la tendance FRACHON dans l'action clandestine.

C'est d'ailleurs cette dernière tendance qui constituera le trio de direction d'Union Départementale C.G.T clandestine du Var et un de ses membres sera désigné par la direction nationale de la C.G.T clandestine pour représenter la C.G.T au sein du Comité Départemental de Libération du Var.

Lors de la fondation du C.D.L en Avril 1943, c'est PORTALIS (alias JOUHAUX) qui avait été invité par les organisations de résistance gaulliste pour représenter la C.G.T, mais informé par le Front National, le trio de l'Union départementale C.G.T clandestine se déclara seul habilité par la C.G.T pour désigner son représentant au sein du C.D.L et justice lui fut rendue sans difficulté.

Pendant ce temps, les conditions de vie de la population laborieuse se dégradent rapidement. Les denrées de première nécessité se font de plus en plus rares. Le coût de la vie s'élève et la faim tenaille les estomacs. Les denrées obtenues avec les cartes de rationnement sont en quantité nettement insuffisante pour subsister et sur les marchés les ménagères en arrivent parfois à se battre pour obtenir quelques légumes en vente libre. On fait la queue des heures pour tenter d'obtenir un chou-fleur, mais il y en a pas assez pour servir tous ceux qui attendent. Seuls ceux qui possèdent des moyens financiers importants ou qui ont des produits à échanger peuvent améliorer leur ravitaillement au marché noir.

Pour les travailleurs, c'est la misère, et la faim est si terrible pour certains, que l'on a pu voir, dans l'Arsenal, des travailleurs fouiller dans les silos à poubelles de la marine de guerre pour y rechercher de la nourriture.

D'autres, après l'occupation de TOULON par les Allemands, n'hésiteront pas à risquer leur vie pour aller prendre quelques pommes de terre dans des wagons gardés par les Allemands.

En ce qui concerne le coût de la vie, voici un extrait d'un bulletin clandestin “L'insurgé”, distribué dans le Var en 1943, citant une déclaration publique de monsieur LENA, Vice-Président de la Chambre de Commerce de Grenoble, “De 1949à Mai 1943, la vie a augmenté de 222% et les salaires de 50% seulement”.

Les travailleurs étaient les principales victimes de la politique de collaboration du régime pétainiste et de la révolution nationale.

Aussi accordèrent-ils toute leur sympathie aux “Comités d'Unité d'Action” et “Comités Populaires” clandestins qui se créèrent dans les entreprises : Mines de Bauxite, Chantiers F.C.M de LA SEYNE, Arsenal de TOULON, Cheminots, Traminots, Usines des Cuirs et Peaux de Barjols, etc...

Ces Comités étaient les organismes de base de la C.G.T clandestine. Ils appelaient les travailleurs à agir pour l'augmentation des salaires, pour un meilleur ravitaillement, pour l'augmentation de la ration de pain, mais aussi comme le dit le tract du Comité Populaire des mineurs varois :

“Pour secouer le joug, pour défendre notre pain, notre vie, pour libérer la France des lâches et des traîtres, mineurs varois : pas un kilo de charbon ou de bauxite ne doit être extrait pour l'Allemagne”.

Et les mineurs de bauxite répondirent à ces appels par des grèves, par le sabotage de la production, en aidant les groupes d'action de F.T.P auxquels ils fournirent les explosifs nécessaires pour faire sauter les voies et notamment plusieurs locomotives du dépôt de CARNOULES.

Dans l'Arsenal de TOULON, le comité clandestin d'unité syndicale publie un bulletin ronéotypé “LA CLOCHE”, dans lequel on lit l'appel ci-après en Octobre 1943

“Fraternellement unis, déposons notre cahier de revendications , refusons de travailler le 11 Novembre, désertons les ateliers et tous, au chant de “La Marseillaise”, manifestons Place de la Liberté contre l'ennemi commun”.

Et les travailleurs de l'Arsenal firent une grève unanime de 11 à 11 heures 30, le 11 Novembre. Le soir à 18 heures, ils participaient en grand nombre à la manifestation patriotique Place de la Liberté.

Dans ce même numéro de “LA CLOCHE”, on relève aussi un appel aux jeunes de la classe 43. Ces jeunes devaient être envoyés en Allemagne pour le Service du Travail Obligatoire. L'appel de “LA CLOCHE” leur demandait de “se soustraire au S.T.O et de Rejoindre le maquis, les groupes des vaillants F.T.P.F.”.

L'instauration du service du travail obligatoire destiné à alimenter en main d'œuvre l'industrie de guerre de l'Allemagne, eut une conséquence inattendue des instigateurs de ce travail forcé. De nombreux jeunes préféraient rejoindre le maquis plutôt que d'aller en Allemagne travailler pour les nazis.

Et c'est ainsi que les maquis virent grossir leurs effectifs. Parmi ces jeunes ouvriers de l'Arsenal, Albin ROUX devait se distinguer dans l'action armée contre l'occupant.

Arrêté une première fois dans la région des Arcs et transféré à la prison des Baumettes à MARSEILLE, il s'évade et avec l'aide des cheminots, rejoint avec un autre évadé, le maquis. Transféré dans un maquis des Alpes-Maritimes, il trouvera une mort glorieuse dans le combat contre les nazis. Sa ville, LA VALETTE, lui a rendu hommage en donnant le nom d'Albin ROUX à une de ses rues.

Les tracts des Comités d'Unité Syndicale, les journaux C.G.T appelaient aussi les travailleurs à saboter les machines de guerre hitlériennes par tous les moyens à leur disposition.

Ces appels aussi étaient suivis, notamment à l'Arsenal de TOULON et aux Chantiers de LA SEYNE-sur-MER, où des machines outils étaient détériorées ; des pièces, destinées à des navires, utilisées par des Allemands, disparaissaient en cours d'usinage.

Aux F.C.M, de l'acide était versé dans les parties vitales des moteurs de navires, de la limaille était placée dans les graisseurs des roues de wagons, etc...

Dans un rapport de police du Commissariat de LA SEYNE au Préfet du VAR, en date du 12 Octobre 1943, on peut lire :

“J'ai l'honneur de vous rendre compte que le poste radio du chasseur numéro 9 utilisé par la marine de guerre allemande, en réparation aux Forges et Chantiers de la Méditerranée, a été saboté dans la soirée du Mercredi 6 Octobre courant. Tous les appareils ont été détériorés à coups de marteau, semble-t-il...”.

En même temps, les comités d'unité syndicale poursuivaient leur activité pour chasser les pétainistes des directions des syndicats légaux.

Sur l'impulsion des membres de ces comités, à l'Arsenal de TOULON, près de 1.000 cartes du syndicat légal furent placées et le secrétaire du syndicat, un nommé André DUPUIS, fut mis dans l'obligation de convoquer une assemblée générale.

La première fut remise, la salle s'avérant trop petite. La seconde, début Novembre 1943, dans une grande salle de La Bourse, permit de faire pénétrer dans le conseil d'Administration du syndicat plusieurs travailleurs ayant l'appui du mouvement syndical clandestin. Mails il ne fut pas possible d'écarter le secrétaire pétainiste.

A LA SEYNE-sur-MER, par contre, les métallos de F.C.M, au cours d'une réunion à la Bourse du Travail, fin Octobre, mettaient en minorité les dirigeants pétainistes du syndicat et élisaient une nouvelle direction.

Quelques jours plus tard, un mot d'ordre de grève pour le 10 Novembre à 17 heures était lancé de bouche à oreille.

Cette grève fut unanime pour les revendications, et le lendemain, le 11 Novembre une nouvelle grève était déclenchée à 11 heures suivie d'une manifestation avec défilé de plusieurs centaines de personnes de la Place de La Lune (aujourd'hui Place Benoît FRACHON), à la mairie.

A bord du paquebot André LEBON, ancré dans l'Arsenal de TOULON, les marins de la marine marchande ont contraint le dirigeant pétainiste de leur syndicat à démissionner ainsi que le signale le rapport des Renseignements Généraux de la semaine du 29 Novembre 1943 au 5 Décembre 1943 :

“A la suite de l'intervention des marins de l'”André LEBON”, le président du syndicat - M. NAVAROLI - a été dans l'obligation de donner sa démission, preuve de l'immixtion soviétique dans les formations syndicales ouvrières”.

Il était de bon ton pour les policiers de PETAIN de voir partout dans l'action des travailleurs “l'immixion soviétique”...

Ce même rapport souligne encore qu'à la suite du bombardement du 24 Novembre, l'inquiétude règne parmi le personnel de l'Arsenal et qu'une “grande partie des employés et ouvriers ne va pas au travail”...

On y relève encore cette “indication” sur l'action des Mineurs de Bauxite : “Chômage général pour la Ste Barbe”.

Ainsi s'achevait, avec cette année 1943, une première année d'occupation allemande, et si l'espoir d'une victoire des alliés se faisait jour, on ne pouvait encore prévoir combien de temps allait durer l'occupation allemande sur le sol de notre département.

L'année 1944 allait voir se développer l'action des travailleurs, mais aussi des réactions plus dures de la part des occupants.

Le 22 Février 1944, les métallos de la F.C.M se mettent en grève pour leurs salaires et pour un meilleur ravitaillement avec, aussi, l'objectif de freiner la production.

Au lendemain de cette journée, les Comités d'Unité Syndicale des cinq centres métallurgistes du Sud-Est : LA SEYNE, LA CIOTAT, MARSEILLE, AIX, PORT DE BOUC, constituent un Comité inter-régional syndical clandestin qui lancera un mot d'ordre de grève pour le 22 Mars 1944. Grève largement suivie, qui sera citée sur les ondes de Radio Alger :

“56 000 heures de grève ont été effectuées par les métallos du sud-Est, bravo pour les métallos”.

Au cours de cette journée, les Allemands tenteront d'intimider les travailleurs F.C.M en mettant des mitrailleuses en batterie sur le Place de La Lune et en invitant, par haut-parleur, les ouvriers à reprendre le travail. Les travailleurs qui ont quitté les chantiers et ont manifesté dans la rue ne reprendront pas le travail. Une courte échaufourrée et des coups de feu de sommation ne feront que galvaniser la combativité des travailleurs.

A Toulon, la police allemande travaillant en collaboration avec les miliciens du P.P.F de DORIOT, procède à l'arrestation de quatre militants du syndicat de l'Arsenal avec, comme motif, action syndicale entravant la bonne marche du travail dans l'Arsenal. Cependant, aucune preuve concrète ne peut être retenue contre ces militants qui ont été arrêtés sur dénonciation de miliciens.

Fouilles et perquisitions n'ont rien donné ; un de ces militants a eu le temps, avant la fouille, d'avaler une feuille de carnet où il avait noté ses rendez-vous.

Les Comités d'Unité Syndicale poursuivent leur action et les tracts continuent à être distribués. Après un mois de détention à la prison maritime, les quatre militants sont libérés. Évidemment, il n'y aura pas de reprise de contact avec eux pour des raisons de sécurité, car il est clair que la police allemande va suivre de très près ces militants pendant plusieurs semaines.

Le fait qu'il n'y aura pas d'autres arrestations prouve que ces militants ont nié toute activité contraire à l'occupant.

La journée du 1er Mai sera marquée par divers mouvements d'arrêt de travail et d'actions diverses notamment à CARNOULES avec les cheminots et surtout à LA SEYNE où, ce jour là, ont lieu les obsèques des victimes du bombardement du 29 Avril.

Les travailleurs des F.C.M arrêtent le travail et les obsèques se transforment en véritable manifestation devant les locaux de la mairie repliés au Collège Curie.

La combativité des travailleurs des F.C.M est vraiment à citer en exemple, car le 6 Juin, pour saluer le débarquement en Normandie, ils arrêteront encore le travail.

Fin Juin, dans une maison à demi sinistrée, située au quartier du Pont de Bois, à TOULON, le long de la Rivière Neuve, se déroule une rencontre entre le trio de l'Union départementale C.G.T clandestine et trois militants de la tendance JOUHAUX afin de concrétiser l'unité syndicale à l'échelon du département, à l'exemple de ce qui s'était réalisé sur le plan national depuis plus d'un an.

Au cours de cette réunion, seront arrêtées les dispositions pour l'organisation de la Milice Patriotique qui participa, aux côtés du F.T.P.F, des C.F.L et de l'A.S, aux combats pour la libération de TOULON et qui se transforma, après la libération du VAR, en “Forces Républicaines de Sécurité” (les F.R.S furent chargés du maintien de l'ordre jusqu'à la création des C.R.S).

Cette réunion des deux tendances syndicales arrêta auusi les dispositions pour la mise en place de l'organisation syndicale dès la libération pour assurer la représentation de la C.G.T dans les délégations municipales que le C.D.L devait mettre en place dans chaque commune au moment de la libération pour remplacer les Conseils Municipaux mis en place par le gouvernement PETAIN.

Avec le mois de Juilllet, on sent l'annonce de combats décisifs et la situation est tendue ; les Allemands veulent l'évacuation de la population des zones côtières et notamment TOULON.

Les associations de résistance appellent à résister à l'évacuation dont le but est de briser l'action de la résistance là où elle peut porter des coups sensibles.

L'UD-CGT appelle à la grève générale insurrectionnelle ; à nouveau ce sont les métallos de LA SEYNE qui sont les premiers dans l'action.

Selon un plan arrêté par l'organisation syndicale clandestine, l'arsenal de TOULON suit et dans la matinée du 11 Juillet le mouvement s'étend d'atelier en atelier. Il en est de même chez les traminots et le lendemain le mouvement devait s'étendre aux cheminots.

Ce jour là, un terrible bombardement, une avalanche de fer et de feu s'abattit sur TOULON et sur LA SEYNE; de très haut, les fortes masses volantes américaines laissaient tomber des centaines de bombes de gros calibres. Ce fut le désarroi.

Toutefois, à LA SEYNE, où les voitures radio allemandes circulaient dans les rues en lançant des appels et des menaces de représailles contre les grévistes, les travailleurs relancèrent l'action en manifestant le 14 Juillet à 16 heures. Des centaines de Seynois se rassemblèrent sur le port et défilèrent jusque sur le Boulevard du 4 Septembre en chantant “La Marseillaise” et “L'Internationale”. Un militant du syndicat s'adressa aux manifestants (il fut ensuite dirigé vers un maquis afin de le soustraire à la répression).

Le bombardement eut pour conséquence de faire quitter TOULON et LA SEYNE par une majorité de la population . De nombreux services de l'arsenal furent évacués dans diverses localités à l'intérieur du département. La population Toulonnaise était tombée à moins de 40 000 habitants. L'on dit même que le nombre de cartes d'alimentation délivrées à TOULON pour Août 1944 atteignit guère plus de 17 000.

Le mouvement syndical clandestin souffrit de cette situation car de nombreux liens étaient rompus et il fallut reconstruire avec ceux qui étaient restés sur place. Le travail était pratiquement stoppé dans les principales entreprises ; les tramways ne circulaient plus ; la circulation des trains étaient problématique. Les Allemands étaient de plus en plus mal à l'aise ainsi que les miliciens car les attentats et sabotages se multipliaient. C'est dans ce climat de tension que fut annoncé le débarquement sur les plages varoises le 15 Août et que l'on vit les convois allemands traversant TOULON être harcelés par les résistants armés bien souvent de simples revolvers ou de modestes fusils.

La Milice Patriotique créée sur l'initiative de la C.G.T fut très active à TOULON où elle prit part aux combats aux côtés des F.F.I et des bataillons de choc de la première armée française.

La Milice Patriotique était divisée en six groupes : TOULON OUEST, TOULON CENTRE, TOULON EST, LA VALETTE , LA GARDE.

Le 20 Août à St Jean du Var, la Milice patriotique fait des prisonniers, récupère des armes, et se bat aux côtés des F.T.P.F. Au quartier du Pont de Bois, le groupe TOULON OUEST, avec des armes récupérées sur des Allemands participa à l'attaque de la hauteur des Arènes. Au cours de cette attaque, un jeune du quartier du Pont de Bois Côme MENA sera tué le 21 Août aux côtés de deux soldats des bataillons de choc en tentant de forcer la défense allemande.

A LA VALETTE, le même jour, la Milice Patriotique participe à une action pour dégager des chars français encerclés par l'ennemi. Le lendemain, elle occupe le Château St Joseph et l'école des Minimes. Au REVEST, le groupe de quartier Armande BARBES s'empara, avec un groupe de l'A.S du lieu dit LA BAUME et faisant la jonction avec les tirailleurs Marocains de l'armée DELATTRE participe à la libération de TOULON. A LA GARDE, la Milice Patriotique, aux côtés des soldats Sénégalais de l'armée DE LATTRE attaque les Allemands retranchés dans le centre de la localité.

Au cours des combats, dans le centre de TOULON, un membre de la Milice Patriotique est tué Place du Théâtre le 25 Août.

LES MAQUIS

L'occupation de la zone sud le 11 Novembre 1942 et de TOULON le 27 Novembre 1942 par l'armée nazie précipitera la création des maquis.

La conception de la lutte armée par le Front National n'est pas d'attendre le jour du débarquement des alliés, mais de créer, par des coups de mains, des attaques surprises, un climat d'insécurité pour les nazis.

Déjà dans la zone nord, le Parti Communiste Français a créé des groupes armés.

Le 23 Août 1941, celui qui devait devenir le Colonel FABIEN, Pierre GEORGES avait donné le signal de la lutte armée en tuant un commandant Allemand à PARIS dans une station de métro.

Pour ces résistants là, recherchés par la police de VICHY et la gestapo, le maquis existait déjà. C'était le maquis des grandes villes.

Le premier maquis varois

Certains résistants, évadés des camps d'internements français avaient trouvé refuge dans les forêts.

C'était le cas du communiste Jean BERTOLINO, secrétaire de l'Union Locale CGT de TOULON. Trois ou quatre autres résistants recherchés par la police viennent le rejoindre dans cette forêt des Maures où ils sont en contact avec l'organisation du Front National et du PCF des localités de Ste MAXIME et COGOLIN notamment.

Vers la fin 1942, leur mission va se préciser : créer un maquis F.T.P.F.

Nous n'aurons pas le témoignage de Jean BERTOLINO, arrêté par la gestapo alors qu'il avait quitté le maquis pour devenir responsable régional, il mourut en déportation ainsi qu'un de ses premiers compagnons Victor LABISE.

Un seynois, ouvrier d'État à la pyrotechnie de TOULON, “Loulou” DIANA se souvient de son arrivée dans ce premier camp F.T.P.F. fin 1942 :

“Ils étaient quatre au lieu dit “La Nartelle” (forêt des Maures), j'ai fait le 5ème. Nous nous sommes regardés et l'un de nous a dit “alors, qu'est-ce qu'on fait ?” et Jean a répondu : “tiens, on s'assoie et on va discuter”. BERTOLINO et SIHUT c'étaient des gars formidables. Notre premier travail fut la récupération de la cheddite dans des carrières. Pour les missions de récupération, nous faisions trente à quarante kilomètres sans rien dans le ventre, sales, minables. On nous appelait “les charbonniers”. Nous nous nourrissions parfois de blé bouilli. Le jour où nous avons eu 20 litres d'huile et d'ail, ce fut une fête. Je préparais les “bombes” avec des vieux bidons”.

Pus tard, ce premier camp devient un centre d'instruction F.T.P.F 1ère compagnie : camp FAITA.

Le “Service du Travail Obligatoire” institué en 1942 à la demande d'HITLER, va inciter de nombreux jeunes travailleurs à rejoindre le maquis, comme les y invitaient les journaux et tracts clandestins des diverses organisations de résistance.

C'est le cas de Charles CORROS qui a cette époque avait 20 ans.

Voici son témoignage :

“A mon retour “des camps de jeunesse” où l'on voulait faire de nous “des enfants de PETAIN”, je suis contacté par un résistant : Jean baptiste MAINETTI, qui me propose de rentrer dans les “corps francs de libération”. Nous étions en 1942. Au début de l'année suivante, je reçois ma feuille pour mon départ en Allemagne. C'est ORSINI de l'A.S de TOULON qui m'expédie à GONFARON, dans le maquis qui allait devenir le camp FAITA. Un matin je prends donc le car et je débarque à GONFARON. Là un homme m'attend , c'est le contremaître de la mine de plomb située au-dessus du village, près du camp. Nous embarquons dans sa camionnette et je me retrouve bientôt en pleine colline. Alors que je croyais trouver une véritable armée, ce sont quatre hommes seulement qui m'accueillent au lieu dit “Cargues” là où je vais vivre dans la clandestinité. Ces quatre hommes, je le compris par la suite, valaient une armée tant leur courage et leur expérience étaient grands. Le chef, Jean BERTOLINO, ancien secrétaire de l'Union Locale CGT de TOULON, ainsi que Pierre SIHUT, Victor LABISE et Maurice POMPEI, étaient des communistes pourchassés par VICHY. Nous n'avions pour toute arme que de vieux "lebels" et des fusils de chasse”.

 

Le camp de la Nartelle attaqué par les gendarmes

Le premier maquis de la forêt des Maures avec la venue de réfractaires au STO et de résistants évadés des prisons françaises se divise en deux camps. L'un à "La Nartelle", près de Ste Maxime. L'autre, à “Cargues” entre Grimaud et Gonfaron. Par une nuit d'Avril 1943, les gendarmes attaquent le camp de “La Nartelle”. Une dizaine de maquisards sont pris parmi lesquels Philippe GIOVANNINI (Maire de La Seyne de 1969 à 1978). Neuf hommes échapperont aux gendarmes et réfugieront au camp de Cargues.

GIOVANNINI s'évadera de la prison de DRAGUIGNAN et deviendra dans le département voisin, commandant des F.T.P.F, qui contribueront à la libération de NICE.

LES MAQUIS SE MULTIPLIENT DANS LE VAR

De nombreux jeunes, refusant le service du travail obligatoire, rejoignent le maquis F.T.P.F FAITA qui va devenir un camp d'instruction. Ces jeunes sont ensuite affectés aux maquis que le Front National a créé à SIGNES (au lieu dit “Les Limattes”) ou Bessillon (entre BARJOLS et COTIGNAC) et dans la région d'AUPS. Ces maquis auront à soutenir de durs combats contre les forces de répression (Waffen SS et milice de PETAIN, le 2 Janvier 1944 à SIGNES, le 22 Juillet 44 à AUPS, le 27 Juillet 44 à BESSILLON.

Six locomotives sautent à CARNOULES

Charles COURROS dont nous relatons par ailleurs le témoignage sur son arrivée au maquis de “CARGUES”, forêt des Maures, faisait partie du groupe qui fit sauter six locomotives au dépôt de CARNOULES. Son témoignage sur cette action est confirmé par les témoignages du cheminot Joseph HYPOLITE qui situe l'action en date du 15 Août 1943 et par un résistant Carnoulais ouvrier de l'Arsenal de TOULON, Emile BOUY, qui lui, situe l'action en Septembre 1943 (le rapport RIGON-BOUDOUBE situe deux actions : en Juillet 43 à CARNOULES et le 8 Septembre 43 aux ARCS).

Toutefois, selon un troisième témoignage (non signé) d'un participant à l'action, le maquis des Maures aurait fait sauter “deux fois les locomotives au dépôt de Carnoules et mis sur le flanc plusieurs wagons”.

Voici le récit de Charles COURROS :

"Le sabotage avait été minutieusement préparé par l'intermédiaire de patriotes travaillant dans les mines de la région, la cheddite fut acheminée au camp ainsi que les détonateurs sous la direction de DIANA Loulou, un ancien de la Pyro de TOULON, les explosifs furent mis au point. La nuit tombée, douze gars décidés dont je faisais partie, s'en vont à travers les Maures, jusqu'aux abords du dépôt. Après avoir posté des hommes de protection aux endroits choisis par avance, l'opération commence. Le dépôt est éclairé comme en plein jour. Deux camarades, choisis pour leur habilité et leur sportivité, parviennent à force d'acrobaties, à placer les charges de dynamite sous les locomotives. Il ne restait plus qu'à fuir ensuite. Six lourdes machines furent ainsi complètement détruites”.

RADIO LONDRES cita l'exploit en ces termes :

“Les patriotes ont fait sauter dans le VAR le dépôt de CARNOULES”.

Dans les grandes villes comme TOULON, LA SEYNE-sur-MER notamment, ainsi que dans quelques localités importantes existaient des groupes de F.T.P.F qui accomplirent de nombreuses actions de sabotages et participèrent activement aux combats de libération de leurs villes, localités et villages.

Armée Secrète (A.S) et Corps Francs de Libération :

l'Armée secrète (A.S) et les Corps Francs de Libération (C.F.L) dépendaient du "Mouvement Uni de la Résistance” mouvement de tendance gaulliste qui regroupait plusieurs organisations de même tendance : Combat, Franc Tireur, Mouvement de Libération Nationale, Libération Sud notamment.

Leur conception de l'action armée était différente de celle des Francs Tireurs et Partisans Français. Les C.F.L étaient de petits groupes agissant dans les villes (action contre les agents de la gestapo et le milice surtout). L'Armée Secrète était constituée par des groupes de dix dont la mission était de rejoindre le maquis le jour du débarquement des alliés en France. Les lieux de ces maquis avaient été préparés dans le Haut-Var aux environs du plateau de CANJUERS où ont eu lieu des parachutages d'armes et près de SIGNES, au lieu dit “SIOU BLANC” à quelques kilomètres de la route nationale de TOULON à MARSEILLE.

Au lendemain du débarquement en NORMANDIE qui eut lieu le 6 JUIN 1944, quelques quatre cents hommes rejoignirent le maquis du “SIOU BLANC”, mais les armes promises ne furent pas parachutées. Ce maquis fut attaqué par l'ennemi le 16 Juin. Alerté, le responsable du maquis donna l'ordre de dispersion. Seuls douze jeunes gens furent surpris par les Allemands et fusillés sur place.

Dans la région du Haut-Var, les maquis A.S menèrent un combat héroïque aux côtés des maquis F.T.P.F, notamment dans la région d'AUPS.

Le 15 Août 1944 :

Le 15 Août, les troupes de la première armée française et des alliés débarquaient à SAINT RAPHAËL et SAINT TROPEZ.

Partout, la résistance passait à l'offensive et apportait une aide efficace facilitant l'avance des armées alliées.

C'est ainsi que TOULON, dont l'État Major allié avait prévu la prise pour environ quarante jours après le débarquement, fut pris seulement dix jours après.

L'Etat Major allemand réfugié dans la Presqu'île de SAINT MANDRIER, territoire qui dépendait à l'époque de la ville de LA SEYNE-sur-MER, capitula sans condition dans la nuit du 26au 27 Août 1944.

Les forces armées de la résistance F.T.P.F, AS-CFL étaient regroupées sous le nom de Forces Françaises de l'Intérieur (F.F.I).

La milice patriotique, force armée du syndicat CGT clandestin, était constituée en Force Républicaine de Sécurité pour assurer l'ordre public.

 

NOTA : Ce texte ne prétend pas relater toute l'histoire de la Résistance dans le VAR. Un ouvrage est en préparation par un historien qui travaille en collaboration avec les membres du comité du VAR de l'Association Nationale des Anciens Combattants de la Résistance.

 

 

TEXTE RÉDIGE PAR JOSEPH BESSONE

Membre du trio de direction de l’Union Départementale de la CGT clandestine du Var

Membre du Bureau du Comité Départemental de Libération du Var

NDLR :

Le livre en question sur “La Résistance dans le Var” vient de sortir. C’est Jean-Marie GUILLON, historien, qui en est l’auteur.

Edité par le CDDP.

 

 

LES VAROIS DÉPORTÉS, INTERNÉS ET TUÉS POUR FAITS DE RÉSISTANCE

- INTERNES DANS LES CAMPS ET PRISONS DE FRANCE

- 1.023 dont 101 femmes

- DÉPORTES EN ALLEMAGNE

- 404 dont 60 femmes
- plus de 101 déportés raciaux

- RÉSISTANTS FUSILLES

- 107 dans le VAR
- 33 hors du VAR

- TUES LORS DES COMBATS DANS LE VAR

- 131

- Hors du VAR : 35

 

BILAN DE L'ACTION DE LA RÉSISTANCE VAROISE EN AOÛT 1944

(avant et après le débarquement des alliés sur le territoire varois).

- 833 allemands tués

- 158 blessés

- 3.760 prisonniers