Je vous accuse réception
du message au personnel des FORGES et CHANTIERS que vous m'avez
adressé et je vous informe que j'en ai donné connaissance à tous
les collaborateurs et ouvriers.
En ce
qui me concerne, vous pouvez compter sur ma collaboration confiante
et le total dévouement aux intérêts de notre Société que j'ai toujours
donné à votre prédécesseur.
Permettez-moi
de vous rappeler au sujet du dévouement à la Société ce que j'écrivais,
il y a une douzaine d'années à M. MAFFERT : lui ayant fait savoir
que j'avais pris connaissance du discours prononcé par notre Président
du Conseil d'Administration, M. MORITZ, à l'occasion du lancement
du “CHEVALIER PAUL” et en particulier du passage où il proclamait
que la devise de notre Société était : “dévouement à la Patrie”,
et j'ajoutais que la mienne était : “dévouement complet à
notre société”, et je n'ai jamais varié.
D'autre
part, je n'ai toujours eu qu'une pensée, qui est celle de produire
à des prix de revient comparables à ceux des marchés étrangers pour
une série importante d'appareils déterminés. J'ai constamment fait
tout ce qui est humainement possible, avec le matériel dont nous
disposons, pour arriver à des prix de revient mondiaux. C'est cette
méthode qui a été appliquée aux grandes séries de pièces de chars
d'assaut au cours des années 1938-1939 et 1940 et les résultats,
au point de vue financier, ont dépassé nos espérances. Cette prospérité
reviendra si le bolchevisme ne s'installe pas en France.
Je vous
signale à ce sujet que nos ateliers de MENPENTI étaient avant cette
guerre, le centre le plus rouge de Marseille. A partir de 1939,
j'ai dû engager une lutte sans trêve, ni merci, avec les éléments
communistes de notre Etablissement et j'ai fait condamner 14 ouvriers
à des peines variant entre 1 et 5 ans de prison pour menées communistes.
J'ai
également profité de l'arrêt des fabrications de guerre en Juillet
1940 et des licenciements qui ont suivi, pour en renvoyer 30 autres.
Il reste
actuellement 29 communistes dans nos Ateliers provenant des cellules
des Forges et Chantiers. Ils ont conservé l'amour de STALINE et
ne cachent pas leur joie lorsque les Russes obtiennent quelque succès.
Parmi
ceux que j'ai fait condamner, ils sont sortis de prison et lorsque
je les rencontre dans les rues de Marseille, je vois ces regards
de haine dirigés vers moi, ce qui me fait penser que la lutte des
classes n'est pas encore terminée.
Je n'ignore
pas, d'ailleurs, ce qui m’attend si les soviets sortent vainqueurs
de cette guerre.
Veuillez
agréer, Monsieur le directeur général, l'expression de mes sentiments
les plus respectueux.
Le directeur
des Ateliers
Signé
: DELACOURT